samedi 29 décembre 2007

Chez Planete.qc.ca...

Lundi le 19 novembre, 2007.
par Louise Turgeon

Prix Robert-Cliche du premier roman 2007
Balade en train assis sur les genoux du dictateur
de STEPHANE ACHILLE

Le prix Robert-Cliche de l’année 2007 est remis à Stéphane Achille pour son premier roman, Balade en train assis sur les genoux du dictateur.

Stéphane Achille présente ainsi son roman : un concours de circonstances amène un musicien frustré à suivre un dictateur sud-américain dans son pays et dans l’exercice de ses fonctions dictatoriales.

Mon comptable à moi m’a demandé de lui présenter toutes les dépenses et tous les revenus de mon disque pour faire mes impôts, et il a mis fin à ma carrière musicale.

Le musicien « raté », qui est le narrateur du roman, part alors pour New York où il rencontre Manuel, un homme au français impeccable et dont le teint basané laisse deviner des origines sud-américaines.

Après seulement trois conversations, il accepte l’invitation de Manuel à l’accompagner pour visiter son pays.

C’est le début de cette drôle de balade que Stéphane Achille nous raconte dans une succession de chapitres très courts, faisant alterner les souvenirs douloureux du musicien parisien et de ses déboires pour produire son premier disque, avec le récit de cet étrange périple en compagnie du dictateur de ce pays d’Amérique du Sud qui ne sera jamais nommé.

Balade en train assis sur les genoux du dictateur tourne autour des conversations entre les deux hommes en voyage.

Dans ce duo plus qu’improbable, qui conservera jusqu’au bout une certaine part de mystère, nous constatons petit à petit que la naïveté ou le cynisme ne sont l’exclusivité ni de l’un ni de l’autre.

La relation entre les deux hommes, fondée sur un rapport de force évident au départ, devient de plus en plus complexe.

Le roman présente ainsi plusieurs retournements qui sont évoqués de manière très subtile par son auteur.

Tous les terrains deviendront glissants, que ce soit le mythe de l’artiste et du créateur, ou les modes et leur médiatisation qui suggèrent aussi une forme de dictature, ou encore les régimes socialistes s’avérant totalitaires...

Stéphane Achille tisse ainsi un climat inquiétant, dans lequel le lecteur ne peut s’appuyer sur aucune certitude.

Avec un récit rythmé et dynamique, qui ne faiblit pas tout au long de ses 79 chapitres, l’auteur réussit à créer aussi un vrai suspens, car on se demande jusqu’à la fin où cet étrange voyage pourra bien mener les protagonistes.

«Je viens de sauver une vie mais j’ai déjà tué deux hommes. Je suis donc toujours déficitaire d’une vie mais je viens de réduire mon déficit de moitié. La comptabilité continue de me poursuivre, que je pense en souriant, sachant que c’est de très mauvais goût. »

dimanche 16 décembre 2007

Dans Le Devoir..

Prix Robert-Cliche 2007 du premier roman - Stéphane Achille mêle naïveté et cynisme.
Caroline Montpetit
Édition du samedi 10 et du dimanche 11 novembre 2007

Son premier roman, qui a remporté le prix Robert-Cliche cette semaine, propose le voyage improbable d'un jeune musicien français frustré, sur les genoux du dictateur d'un obscur pays d'Amérique latine. Balade en train sur les genoux du dictateur, paru chez VLB, est une fantaisie maîtrisée qui oppose l'individualisme marqué d'un jeune homme du Nord à l'idéalisme totalitaire et abusif d'un chef d'État autoproclamé du Sud. Deux personnages qui ont plus en commun qu'il n'y paraît au départ. En entrevue, Stéphane Achille dit même que le dictateur va jusqu'au bout de ses idées, tandis que le musicien est freiné par son besoin de tout contrôler.

Stéphane Achille n'a pourtant jamais voyagé dans la contrée lointaine où il emmène son lecteur, et qui n'a d'ailleurs pas de nom, même si le dictateur qui la dirige a quelques traits en commun avec Fidel Castro, notamment la barbe et l'uniforme. En fait, c'est en rêve qu'il a fait connaissance avec ce dictateur «à la Castro», envers lequel, prisonnier, le narrateur éprouve un mélange de soumission et de dégoût. Dans ce rêve, le dictateur trimballait effectivement Achille sur ses genoux, pour qu'il le regarde faire des démonstrations de puissance, des exécutions.

«Quand j'ai fait ce rêve, dit-il en entrevue, j'ai su que cela illustrait mon rapport avec le pouvoir, qui est fait d'un sentiment double.» On pourrait d'ailleurs refermer ce livre en se demandant si le narrateur a rêvé ce séjour incroyable au cours duquel non seulement il a assisté à des assassinats, mais il en a même commis, et pas des moindres. Ce rapport ambivalent avec le pouvoir incarné par un dictateur n'est pas le seul trait de caractère que Stéphane Achille partage avec son narrateur.

Comme lui, Achille a autoproduit un disque, il y a quelques années, entreprise qui s'est soldée par un échec commercial et qui l'a laissé désabusé du monde de l'industrie de la musique. En ce sens, les premières pages de son roman sont de l'autofiction, admet-il, même si on bascule vite dans un monde totalement imaginaire. Plus tard, Stéphane Achille, dont on peut trouver la musique dans le site achillemusique.com, a décidé de lancer son deuxième disque directement dans Internet, pour éviter les coûts de distribution, de gravure, de pochettes, etc.

Mais, il le reconnaît lui-même, la littérature, qu'il a étudiée, lui a, à ce jour, donné plus de visibilité que la musique. En fait, Stéphane Achille a déjà remporté un concours universitaire, le concours universitaire de nouvelles Paul-Valéry, pour son texte Le Mur, lorsqu'il faisait une licence en lettres modernes à Montpellier, en 1997. Plus tard, il est arrivé cinquième pour le Prix du jeune écrivain, avec une nouvelle intitulée Le Chien et publiée au Mercure de France. Il a gagné le deuxième prix de la Maison de la culture des étudiants de l'UQAM en 1999 pour Les Chats, puis le sixième prix au concours Nouvelles fraîches pour Propos écrits recueillis à l'oreille. De retour au Québec, il a terminé un diplôme en traduction, un métier qu'il exerce aujourd'hui dans le monde de la finance, quand il n'est pas en pleine création.

Dans le Voir.ca...

Stéphane Achille
Balade en train assis sur les genoux du dictateur
T.M.-R. 22 novembre 2007

Quand on se cale dans un fauteuil avec entre les mains un roman au titre aussi évocateur et à la jaquette aussi élégante, jaquette à laquelle on vient de retirer son joli bandeau du prix Robert-Cliche du premier roman 2007, on a déjà un petit sourire aux lèvres, convaincu de s'engager dans un bon moment de lecture. On tique assez vite devant ces chapitres maigrelets, dont plusieurs ne comptent pas plus de trois ou quatre paragraphes et qui hachurent inutilement l'action, mais on se dit que tout de même, l'histoire d'un jeune musicien français frustré se retrouvant du jour au lendemain dans le proche entourage d'un dictateur sud-américain, ça nous réserve de belles choses. Et puis bof. On tique et on retique, tantôt à cause de l'écriture un peu scolaire, qui piétine, tantôt à cause de ce personnage central d'une naïveté invraisemblable, auquel on n'arrive jamais à croire, et on finit par trouver très curieux le choix du jury d'un prix qui, dans ses bonnes heures, nous a fait découvrir Madeleine Monette, Robert Lalonde, Gilles Jobidon... Décevant. VLB éditeur, 2007, 192 p.

samedi 15 décembre 2007

La Recrue du mois de Janvier : Stéphane Achille - Balade en train assis sur les genoux du dictateur

Stéphane Achille est né à Saint-Jérôme, dans les Laurentides, en 1974. Il a habité à Rosthern, en Saskatchewan et à Montpellier, en France. Il est titulaire d’un baccalauréat en études littéraires de l’Université du Québec à Montréal, d’une licence de lettres modernes de l’Université Montpellier III et d’un diplôme d’études supérieures spécialisées en traduction de l’Université de Montréal.

Il a remporté, en 1997, le premier prix au concours de nouvelles Paul Valéry en herbe de l’Université Paul-Valéry à Montpellier pour « Le mur ». Sa nouvelle « Le chien » lui a valu de se classer cinquième au Prix du jeune écrivain 1998 et a été publiée aux éditions du Mercure de France la même année. En 1999, il a obtenu le deuxième prix au concours de nouvelles de la Maison de la culture des étudiants de l’UQAM pour « Les chats » et il a également remporté le sixième prix à la treizième édition du concours Nouvelles fraîches pour « Propos écrits recueillis à l’oreille ». En 2003, il lançait « Exposition », son premier album musical, et, en 2007, paraîtra « Variation », un mini-album en écoute libre sur son site Internet www.achillemusique.com. Stéphane Achille habite actuellement Montréal et il est traducteur depuis 1999.




Quatrième de couverture : Dans un restaurant de New York, un musicien sans succès croise un homme en complet gris accompagné de gardes du corps. Après quelques rencontres amicales, l'homme invite le musicien à visiter son pays. Et les voilà à bord d'un train sillonnant un pays d'Amérique du Sud où règne la terreur. Or cette terreur est à sens unique, car l'homme au complet gris est « président à vie » du pays en question, un dictateur qui gouverne son peuple l'arme au poing. Sous sa soudaine et imprévisible tutelle, l'innoncent musicien se verra asséner de mémorable leçons. Roman humoristique et cruel sur le pouvoir, écrit avec un enthousiasme communicatif, Balade en train assis sur le genoux du dictateur nous entraîne dans un voyage étrange et captivant.

Source : VLB éditeur

Combat inégal

Dans le métro, Rose est témoin d’un suicide. Traité par l’auteur comme un ballet macabre méticuleusement chorégraphié, cet élément déclencheur nous plonge d’entrée de jeu dans un univers sombre, vaguement malsain, mais duquel se dégage malgré tout une certaine poésie. On suit ensuite pas à pas le parcours de Rose, jeune femme pétrie d’ambivalence et emplie d’une colère sourde, qu’elle tente de sublimer à travers la boxe mais qu’elle ne réussit jamais à contrôler entièrement (violence latente qui se transmet également à sa sexualité).

J’aurais aimé pouvoir m’attacher à cette enfant en marge d’elle-même, à cette jeune fille qui tente de s’émanciper d’un passé trouble, à cette femme qui se cherche dans une sexualité hors normes, mais je n’ai malheureusement pas réussi à le faire. Question de ton, de style? Les descriptions de l’univers si particulier de la boxe, que ce soit la salle d’entraînement, les séances avec Coach, les matchs eux-mêmes, sont particulièrement réussies et dénotent une maîtrise certaine du langage. Les retours dans le passé de Rose – notamment les allusions répétées à ce fameux texte rédigé en Secondaire I qui, selon moi, ne méritait certes pas un 10/10 – convainquent beaucoup moins.

Incapable de saisir la nature exacte de l’objet littéraire créé par Simon Girard, je me suis longuement interrogée. Cherchait-il à faire le récit d’une jeunesse blasée, revenue de tout, qui choisit la violence plutôt que la résistance? Capitalisait-il sur la tuerie de Dawson pour attirer l’attention? Devais-je percevoir le récit comme un roman d’apprentissage, dans laquelle l’héroïne tente d’exorciser un passé familial très lourd? À force de danser sur place, d’essayer de deviner la tactique de l’adversaire, difficile de se laisser happer par l’histoire, à moins qu’elle ne soit narrée avec un style exceptionnel, ce qui n’est pas le cas ici selon moi. J’ai donc abandonné la partie, à défaut d'être mise K.O.

Le coeur en poing

Rose n’a rien de rose. Une vie qui l’a éprouvée. Une famille qui l’a humiliée. Un vide intérieur qui la ronge, la hante alors qu’elle songe constamment à la mort. Pourtant, Rose vit. Avec une rage au ventre. Quand survient la tuerie du collège Dawson, Rose vient de quitter son emploi de danseuse nue. Alors qu’elle pose un regard cru sur le geste du tueur, elle le condamne tout en cultivant une autre forme de violence : celle du ring. La boxe. Car Rose frappe. Frappe et frappe encore. À travers ses larmes, elle entrevoit peut-être une lumière dans la présence Coach, vieil homme usé par la vie et les combats, et dans celle de son voisin et amant de passage, Otto.

Curieux roman que Dawson kid. J’en ai aimé l’écriture saccadée, rythmée, intense. On y voit un rapprochement entre les coups de poing de l’héroïne. Une écriture qui frappe.

Pour le reste, je suis dubitative. Le personnage de Rose est ambigu. Il s’agit d’une jeune femme meurtrie. Obsédée par ses démons, mais très lucide sur la vie. Elle lit beaucoup, malgré ses origines modestes, le milieu duquel elle est issue. Elle écrit, aussi. Car la narration est au « je » et le roman est bâti comme un journal intime. Mais quelque chose dans la cohérence du personnage cloche. D’abord, l’agressivité de Rose finit par agacer puisqu’elle ne mène, finalement, nulle part. Le personnage n’évolue pas. L’histoire se termine en queue de poisson et on se serait attendu à un minimum de « guérison » ou de prise de conscience. Mais non. Le lecteur n’a été mené nulle part ailleurs que dans les élucubrations noires et agressives du personnage central.

Un autre aspect qui m’a agacée est qu’on a du mal à croire à la féminité de Rose. Si l’auteur a réussi, avec ce neuvième essai, à se sortir de l’auto-fiction, on sent malgré tout l’inspiration qu’il puise à sa propre vie. Les réflexions de Rose, sa violence, ses fantasmes sexuels où elle s’imagine violer des hommes m’ont fait sourciller. Finalement, j’ai senti un piétinement de l’histoire vers le milieu du livre. J’avais été happée par le style efficace, frappant, de Simon Girard, mais j’ai vite été étourdie et lassée par la succession des coups de poings.

Un livre qui frappe, certes. Mais sur quelle cible? Je ne sais trop.

Un combat de trop!

Une danseuse nue devenue boxeuse qui aime se perdre dans les livres, fantasme sur la masturbation à répétition et qui a toujours son arme au bout du bras, ça me dérange! Traiter l’abus et la violence par la violence? Je n’ai jamais pensé que c’était la bonne méthode à utiliser et l’auteur ne m’a certainement pas convaincue avec son texte… J’ai refermé le livre après chacun des quatre premiers chapitres en me disant que je n’arriverais pas à me rendre jusqu’au bout. Je l’ai fait par respect de mes engagements, mais ce livre ne se retrouvera certainement pas dans le bas de Noël de mon entourage… J’ai trouvé cela vraiment désagréable que le prétexte de Dawson ait servi à déclencher une autre vague de violence… chez une femme en plus! Beaucoup d’intensité dans certains passages et trop peu dans bien d’autres. Il a définitivement perdu son combat avec moi!

Cible ratée

À part son rythme rapide, nerveux et efficace, j’ai du mal à trouver d’autres aspects positifs à ce roman inachevé. Dawson kid est, tout au plus, un bon manuscrit qui aurait mérité plusieurs retouches avant d’être publié. L’action n’évolue pratiquement pas d’un couvert à l’autre. On nous sert la même sauce à répétition. Le style, loin d’être maîtrisé, est parfois confus. C’est comme si on lisait un tas de mots mal définis qui ne vont pas toujours ensemble.

Le sujet n’est pas mieux. L’histoire de cette jeune fille pleine d’une violence incommensurable qui tente de la faire sortir par le biais de la boxe ou en cognant sur tout ce qui l’entoure manque cruellement d’originalité. Évidemment, sa révolte la pousse à devenir danseuse nue question de se venger sur les hommes et elle se réfugie dans une sexualité brute pour les mêmes raisons. À part quelques retours sur le passé de Rose, l’auteur ne va jamais dans la profondeur des enjeux préférant rester à la surface d’un comportement violent. Les réelles intentions du personnage nous échappent complètement et ça devient vite lassant pour le lecteur.

Je n’ai pas toujours cru au fait qu’il se soit mis dans la peau d’une fille. Dans la plupart des situations, c’est un gars que j’imaginais à la place de Rose. Son obsession pour la masturbation (ça revient constamment tout au long du roman) m’apparaissait comme étant celle d’un gars. Pareil pour l’envie de cogner sur tout ce qui bouge. Je me trompe peut-être, mais c’est comme ça que je l’ai ressenti.

Le lien avec la tuerie de Dawson n’est pas vraiment exploité et m’a semblé un peu facile surtout lorsqu’on a lu le magistral Il faut qu’on parle de Kevin de Lionel Shriver. Simon Girard a voulu en mettre plein la vue en exploitant le thème de la violence, mais à trop vouloir la décrire il a fini par rater sa cible.

Et moi j'ai aimé me battre avec ce livre...

Rose Bourassa ne l’a pas eu facile. Elle a 20 ans à l’automne 2005 quand elle décide de quitter le bar de danseuses où elle travaille, le même automne où un tueur débarque au Collège Dawson lourdement armé emportant sa propre vie et celle d’une jeune étudiante. Rose Bourassa change de vie cet automne-là.

Ce roman porte sur la violence. Celle de nos sociétés, celle des familles, mais aussi sur la violence intime, celle qui rampe au fond de nous. Un Xième roman sur la violence et sur la résilience ? Comme j'en suis sortie bouleversée, il faut croire que le sujet n’est pas encore épuisé. Le coup de force de Simon Girard c’est d’arriver à évoquer les zones floues de la violence entre les rôles de bourreau et de victime. Nous rappelant que le bourreau d’aujourd’hui est souvent la victime d’hier, quand il n’est pas le héros de demain. Le titre même du livre évoque cette ambivalence : «Dawson kid» est-ce le jeune homme meurtrier ou la jeune fille morte de sa folie ? À qui Rose ressemble-t-elle le plus ? Justification de la violence ? Ce n’est pas ce que j’en ai retenu, mais une danse très habile sur un fil très mince avec un personnage principal souvent détestable auquel j’ai pourtant complètement adhéré.

La grande force de l’ouvrage : une narration soutenue, étourdissante, comme sur un ring de boxe. Avec des uppercuts littéraires et des mises au tapis. Par moment, il m’a semblé que c’était un peu trop. J’en arrêtais de lire attentivement à force d’être portée par des réflexions circulaires et décousues. Mais c’est mineur en comparaison au plaisir (est-ce du plaisir vraiment ?), disons plutôt à l’engagement que ce roman a fait naître en moi. Maintenant j’ai envie de faire de la boxe.

KO dès le 1er round !



Elle s'appelle Rose Bourassa. Elle a vingt ans. Il y a deux choses qui ne la quittent jamais. L'idée de la mort, sa propre mort, et une sourde envie de cogner. Que ce soit au Gold, où elle danse autour des poteaux et aux tables, ou dans les couloirs du métro. Jusqu'au jour où elle commence son entraînement à la boxe et où elle fait la connaissance de Coach. Coach qui lui enfonce ses gants comme une mère met sa tuque à son enfant, en la brassant un peu, parce qu'elle est dans la lune, au paradis, entre des mains aimantes. Elle se dit alors qu'elle a peut-être réussi à faire reculer sa mort.
(Extrait du 4ème de couverture)


Je vais être directe : je n'ai pas du tout aimé. Il m'a été impossible de m'attacher au personnage de Rose et à son histoire, ainsi qu'à l'écriture de Simon Girard que j'ai trouvé trop orale, trop proche du langage parlé. Je n'ai ressenti aucune émotion, aucune sensibilité dans ce roman. Ce fût donc une lecture extrêmement pénible car je voulais quand même aller jusqu'au bout, recrue oblige ! Mais non, à aucun moment, je n'ai crû en ce personnage de femme et en son histoire. Et impossible de me raccrocher à l'écriture de Simon Girard. Dommage !

Coups, sueurs et révolte

Je vous le dis d'emblée, Dawson kid est un roman rude... brutal. Rose Bourassa a le coeur froid et n'a pas froid aux yeux. Qu'on se le dise : elle frappe, frappe sur son mal de vivre, sa rancoeur vis-à-vis sa famille, ses frères, son père et la société. Elle s'offre la jouissance d'un déluge de coups qu'elle n'essaie même pas de mesurer. Elle cogne fort et après seulement, elle réfléchit. Pour Rose, les coups sont une thérapie personnelle, comme on dit ici : elle fait sortir le méchant; et dans son cas, c'est une question de survie.

Extrait :

Si j'ai voulu me tuer si souvent ces dernières années, c'est pour la raison de celle qui m'y poussait avant : je ne sens plus rien, donc je n'ai plus mal. Donc rien ne me dit que je suis vraiment en vie, encore. La tête a de la difficulté à y croire. En rêve on se pince, alors que dans la vie on se casse, on essaie en tout cas, on y pense, pour le moins. Si je n'ai jamais eu qu'un seul espoir, c'est de voir le jour où renaîtra la petite princesse rebelle, celle qui n'avait pas peur des coups, qui pouvait tout prendre, qui était née pour faire la guerre, à tout, qui allait tout défoncer. Je ne veux pas, plus jamais pleurer, je suis convaincue qu'il y a des façons plus constructives de sortir le méchant ; je l'ai fait avec tous ces livres que je tenais dans mes jeunes mains. (p. 30)

Simon Girard nous offre un roman extrême rempli de sueurs et de révolte. Une écriture « punchée » sans moyen d'esquiver les émotions pêle-mêle qui surgissent au travers des lignes denses sans répit. Après cette lecture, on se dit : ouf ! J'en suis sortie sans trop de bleus. Lecture très intense.

Réf. : Dawson Kid, Simon Girard, Boréal, 2007, 192 pages, ISBN : 13 978-2-7646-0556-1

vendredi 14 décembre 2007

Rose épineuse

N'attendez pas de moi que je dise que c'est un livre coup de poing. Trop tentant, trop lu, trop vu, s'en est quasiment comique.


Il y a d'autres choses à dire de l'histoire de cette femme écorchée qui trépigne sur un pied et sur l'autre, une femme « gars » avec l'adrénaline poussé à bout et la testostérone à fleur de peau. Cette Rose, une jeune femme que l'on suit en ressentant un fort inconfort. J'ai éprouvé de la difficulté à la suivre, autant qu'à l'abandonner. Pourquoi ne pas l'avoir abandonnée ? Sa douleur répétitive a quelque chose de lassant, une douleur qui ne mène nulle part, c'est dur sur les nerfs. Un exploit de l'auteur qui a réussi à me raccrocher à ses problèmes grossis à la loupe, ces coups de poing (bais oui, je succombe !) à la vie et à celui qui lui a donné la vie. Je me le suis demandé, vous pensez bien, pourquoi si difficile cet attachement, grandissant lentement avec les lignes qui nous passent sous l'oeil ? Je réponds à cause de l'intensité, palpable, celle du créateur de Rose, et je nomme Simon Girard. On sent que ça bouillonne dans cette tête d'écrivain qui pousse le crayon avec instinct et fougue. Son principal talent est de laisser bouillir à gros bouillons sans mettre de couvercle. Il ne faudrait pas mettre de couvercle, ça déborderait c'est sûr.


L'attachement à Rose est essentiel puisque l'on souffle en même temps qu'elle et je l'ai eu ardu, laborieux, pour refus de son sexe. J'ai refusé son « femme » longtemps, presque tout le temps. Je ne la voyais pas femme, cette Rose épineuse. J'entendais et voyais l'auteur tout le temps souffler dans son personnage comme dans un personnage gonflable. Ce n'était pas Rose qui apprenait à donner les coups de poing au bon endroit, entre quatre cordes bien tendues, mais un homme, l'auteur c'est certain. Et puis, il faut dire que les premières scènes de boxe m'ont quelque peu lassée. Décortiquer à ce point un coup de poing, c'est du haut voltige d'écrivain mais est-ce que la spectatrice cloisonnée que j'étais, et non férue de boxe a embarqué dans le ring ? Non. Le goût a été grand de sauter quelques crochets mais je ne l'ai pas fait par respect pour l'auteur, si présent, si intense dans son désir d'être. On ne raccroche pas au nez de quelqu'un qui nous raconte sa vie par petits coups, haletant.


Certaines phrases, certains paragraphes m'ont laissée coite, c'était senti pas seulement écrit, j'étais béate d'admiration devant cet oubli de soi pour se laisser aller au geste d'écrire. Écriture nerveuse et instinctive. Écriture qui s'abandonne.


J'ai hâte de voir le prochain sujet de l'auteur, bien sûr, j'ai hâte. Se donner un peu plus de temps pour peaufiner, pour sortir du jet à l'état brut, qu'est-ce que ça donnerait ? J'ai l'impression que l'auteur écrit à chaud mais que le travail de réécriture n'est pas son fort, entraînant dans le texte des mouvances qui pourraient décourager certains impatients. À ce qui me semble.


Mais un jour, mêlant l'ardeur naturelle au travail acquis, un chef d'oeuvre, pourquoi pas, pourrait être à portée de plume.